Récit de Voyage - Pérou 2011


Pérou 2011


LE VOYAGE ORGANISÉ AU PÉROU DU 4 AU 24 NOVEMBRE 2011

Par Danielle Meunier, présidente d’IAI et accompagnatrice internationale de voyages alternatifs.

Le 5/11

Après le petit déjeuner pris dans la toute nouvelle salle de restaurant aménagée par les femmes constructrices formées par Mano A Mano, nous prenons le chemin du centre ville avec deux voitures fournies par Mano A Mano. A 10 h, nous rencontrons notre guide Manuel Aguirre, archéologue français vivant depuis 40 ans et entièrement « péruanisé », Professeur de l’Université San Marcos, spécialiste des cultures en terrasses et de leurs applications sociales dans les communautés andines. Il guide la visite du Musée d’histoire et archéologie de Pueblo Libre. Sa présentation très vivante et très professionnelle passionne chaque année les visiteurs. Ce musée, est vraiment l’introduction de choix pour comprendre la mosaïque impressionnante des cultures pré-hispaniques. A la sortie du musée nous attendent notre ami astronome Barthélemy d’Ans et sa maman enseignant la paléontologie depuis 40 ans au Pérou. Une agréable rencontre au restaurant faisant face au musée. Notre ami Michel, guitariste se choisit son instrument pour amener ses compositions tout au long du périple. L’après-midi se poursuit par la visite du centre ville de Lima : le quartier présidentiel, la relève de la garde, Plaza San Martin, Jiron de la Union, le «Parque de las Leyendas». Au couchant du soleil, c’est impressionnant de s’installer un moment au sommet du Cerro San Christobal pour observer la construction de la ville et l’opposition des quartiers opulents et des autres… En soirée, la sortie musicale au centre Culturel Breña que j’avais programmée a tourné court, car la salle était fermée. Le groupe est allé souper un bouillon de poule chinois avant de rentrer à Mano A Mano.

Le 6/11

Après le déjeuner prévu à 7 h, la camionnette nous amène au terminal de bus Soyuz pour faire le voyage de 5 h (315 km) jusqu’à Ica. Les cuisinières nous préparent un pic-nic bienvenu. Nous laissons les bagages à la consigne du bus pour prendre le temps de déguster un bon pisco (alcool de raisin équivalent au genièvre) à Huacachina, lieu mémorable, anneau de dunes de sable blanc entourant une lagune tiède. Une heure de détente à peine avant de reprendre la route de 2 h jusqu’à Nazca. A Nazca, Edmundo, le jeune héritier de Wasipunko nous amène à l’ecolodge situé hors du centre. Le père d’Edmundo a légué un vignoble et actuellement, la famille produit une centaine de bouteilles d’un Pisco très apprécié. La famille s’est organisée pour construire de petites maisonnettes décorées avec un style rustique très créatif afin de loger les voyageurs. La beauté du site est toute étudiée pour créer un charme émouvant. La végétation et les objets du passé se marient joliment. Olivia la maman d’Edmundo, artiste peintre a transposé sa palette dans tous les recoins.

Le 7/11

Vers 8 h du matin, le jeune guide de la communauté Pajonal Bajo nous emmène sur le sentier sablonneux de la pampa. Il nous fait découvrir la nature environnante : le caroubier avec ses racines qui sondent le sable jusqu’à 80 m de fond pour survivre à la sècheresse, la noix de pécan, les cotons de couleur, la grimpante griffe de chat, le faux poivre ou Molle, les daturas, les avocatiers, les Bougainvilliers, le mimosa, les agaves, le ricin, l’oiseau Chaucato (qui, dans la stylisation des géoglyphes est ce qu’on appelle le Condor), les crapauds qui se défendent par leur urine urticante… Nous observons les plantations de figuiers de barbarie à perte de vue. C’est la culture qu’a choisie la communauté. Ils achètent les insectes de cochenille (sorte de doryphore), ils se développent sur les figuiers comme une poudre blanche. 1 kg de cochenille se paie 250,00 €, on récolte tous les 3 mois, on sèche pendant 8 jours et on exporte aux USA l’insecte réduit en poudre. Les USA fournissent la technologie pour terminer le produit qui sert de cosmétique et de teinture. Au terme du chemin, une famille nous sert le déjeuner consistant en riz fifirifi, avec un œuf, des légumes coupés en fines lamelles, pois carottes délicieux, sous l’ombrage d’une vigne tentaculaire.

Nous revenons au domaine de Wasipunko pour rencontrer notre second guide Jesus Erazo. Maria Reiche, cette mathématicienne Allemande qui consacra sa vie (années 38 à 98) à la conservation des géoglyphes de Nazca et qui a transmis sa passion aux enfants qu’elle a formés dans les écoles de Nazca. Jesus fut élève de Maria quand il avait 8 ans.

Jesus nous emmène au dessus de la tour métallique unique point de vue d’où on peut deviner le début de 3 géoglyphes, tant ils sont étendus. Du haut d’une colline on distingue clairement les tourbillons de vents qui ballaient naturellement les lignes depuis 2000 ans, les faisceaux de lignes droites et trapézoïdes. Nazca est à 600m d’altitude. Dans le lointain se détache la blancheur de la plus haute dune du monde, 2100m lieu de cultes immémoriaux, le « Cerro Blanco ». Le groupe se dirige vers le musée Maria Reiche qui expose les objets personnels de cette passionnée du désert. La vieille camionnette Volkswagen brune dans laquelle elle organisait ses longs bivouacs de recherche astronomique et archéologique. La petite chambre qu’elle occupait, les panneaux explicatifs de ses investigations et quelques photos de sa sœur Reinate, médecin en Allemagne et qui l’a appuyée jusqu’au bout en 1990. Le diner se compose d’une succulente Cebiche, plat local de poissons et fruits de mer cuit au citron vert et piment, accompagné de maïs frais et de patate douce. Après le repas, nous atteignons les aqueducs de Chauchilla datant de 2000 ans et dont se trouve une réplique en Iran et en Chine. Grâce à ces aqueducs souterrains conduisant les eaux pures Andines jusqu’à la mer, les anciens Nascas ont développé leur agriculture et leur culture magnifique au sein du désert le plus sec au monde. Les aqueducs sont construits de bois de Caroubier très dur, intact depuis 2 millénaires. C’est l’ingéniosité de ce peuple qui organisant les ouvertures en spirales gauches, concentriques et droites, contrôlent le débit de l’eau à l’intérieur des aqueducs, été comme hiver, permettant au cours d’eau, de ne jamais toucher le toit de l’étroit conduit. Une merveille de l’ingénierie hydraulique ! Jesus nous fait visiter les céramistes Nazca qui reproduisent exactement les poteries et les dessins du passé. Un bon bain dans la piscine du grand hôtel Nazca Lines nous détend avant la session d’étude du planétarium observatoire des géoglyphes en lien avec les constellations des anciens Nazcas et observation de la surface lunaire. C’est notre ami Barthélemy d’Ans qui a créé cet observatoire astronomique a Nazca. Ouf, une journée bien remplie, vite se reposer dans le silence de Wasipunko. Pourtant les découvertes ne sont pas terminées. A Wasipunko, Edmundo a préparé un repas traditionnel, la pachamanca, viandes, maïs, fèves et patates cuites à l’étouffée avec des galets bouillants placés dans un trou de terre chaud, précédé d’une petite cérémonie de remerciement à la terre-mère. Pour l’occasion, Michel, notre guitariste nous entraine à chanter quelques unes de ses compositions et nous distribuons les tablettes de chocolat belge à nos hôtes.

Le 8/11

Tôt levés, Edmundo nous conduit tout droit à l’aéroport pour le survol des géoglyphes. 4 par 4, dans 2 avions cesna, les passagers découvrent le symbolisme et le graphisme particulier aux anciens Nazcas. Après le vol, nous roulons enplein désert jusqu’à la pyramide de Cahuachi où travaille un archéologue Italien Orefici. En réalité, Cahuachi est un complexe archéologique de très haute importance, constitué de 30 grandes pyramides coniques, situées en contrebas de la pampa de Nazca, lieu de pèlerinage et de culte entièrement ensablé lors d’un tsunami ou changement climatique. Un complément d’information archéologique sur les tissages, les poteries, les momies et les plantes excavées de Cahuachi nous est donné dans l’après midi, au musée Antonini. Nous visitons ensuite une école de jeunes potiers organisée par la municipalité. Les tours se mettent en marche pour nous faire la démonstration de leur habileté d’artistes. Malgré leur jeune âge, ils ont gagné des prix internationaux. De là, dans la nuit, nous sommes arrivés chez une famille Afropéruvienne. Le grand père, nous accueille au jardin, dans un cercle de siège où chacun prend place pour assister à cette activité littéraire particulière du Pérou, l’art Décimiste, le contrepoint Décimiste, équivalent de notre Rap moderne, mais vieux de centaines d’années. Cette famille originaire du Congo aux origines Mandingues, nous accueille à bras ouverts, avec leur art et une petite démonstration de danse. Le Chirulin, (Pisco + eau + pamplemousse) passe de main en main et les sourires timides se détendent au cours de la soirée chaleureuse. Notre musicien Michel Jandrin, fondateur du groupe « L’air de rien » partage deux ou trois de ses compositions entraînantes. Cette famille vient d’ouvrir courageusement sa porte à des étrangers, c’est un effort couronné de succès. Une nouvelle nuit dans le calme de Wasipunko nous régénère.

Le 9/11

Nous faisons nos adieux à Wasipunko et bouclons nos valises, car c’est notre dernier jour à Nasca. Il y a 5 jours Pisco a vibré sous de faibles tremblements de terre. Ces mouvements sismiques ont provoqué de hautes vagues dans l’océan pacifique, ce qui nous empêche de réaliser notre programme : embarquer sur des barques de pêche pour observer la biodiversité marine. Notre guide Jesus propose de visiter en buggy, la Baie San Fernando, mon rêve depuis de nombreuses années… rêve rendu possible par la récente organisation de tourisme communal dans la réserve écologique nationale San Fernando, département de Ica, Province de Nazca, district de Marcona. A pied, dans la baie et sur la plage naturelle de « la aguada » et le mirador « punta gallinazo » nous découvrons les algues sargasses, loups de mer ou otaries, les phoques, les loutres marines, le dauphin commun, les baleines à bosse, les pingouins de Humbold qui sont pourtant des manchots, différents Cormorans, les huitriers pie, les sternes, les pélicans, les vautours, les condors, les Guanacos variété de lama sauvage, les renards du désert, les lézards…
Toute cette faune et cette flore est intacte et beaucoup plus présente que sur le point de vue de tourisme de masse des Iles Ballestas. Il y a 35 ans, j’ai vu ces Iles pour la première fois et une masse intense de touristes empruntaient déjà ces vedettes diluant journellement leur essence dans l’eau marine, polluant toute la zone. Aujourd’hui, les dégâts sont immenses. Observer depuis la côte est plus écologique, vous l’aurez compris. Merci Jésus de nous faire ce cadeau.
Pour le souper, c’est dans la maison de Jesus que nous dégustons une spécialité que son épouse à préparée. Sylvine Piscart, une voyageuse venue en 2005 avec IAI au Pérou et qui y s’est installée vient nous rejoindre pour participer à la petite fête d’adieu des Nascas. Jesus reçoit sa tablette de chocolat belge. Un dernier Pisco à la Casa del Pisco Garcia et à 22 h nous montons dans le bus de nuit pour la capitale Inka, Cusco, 14 h de voyage dans des sièges couchette. C’est la tradition, dans ces bus nous avons droit à quelques films bruyants et les boissons et déjeuner.

Le 10/11

Vers 11 h nous arrivons enfin et installons nos effets dans les chambres soignées de la Casa Campesina, hôtel qui développe des projets avec les paysans. Après une bonne douche, et un diner végétarien, nous déambulons dans les places arborisées, devant la Cathédrale et les rues historiques de la ville. Le petit musée des enfants Andins Yupaychay est très touchant avec les œuvres d’art peintes expliquant leur vision d’un monde différent où les montagnes parlent et sont des personnes, où les animaux prennent une place particulière. A 6 h, notre projet de participer au concert de musique native tombe à l’eau, la salle est au complet, ce qui nous permet un petit repos bien mérité.

Le 11/11

Tôt le matin, en compagnie de notre guide de l’association des jeunes Inkas vivants, nous visitons le magnifique temple Inka du soleil, le Koricancha sur lequel les conquérants espagnols se sont empressés de construire un couvent et une église. Le Koricancha conserve toujours le temple de la lune, de l’éclair, du soleil, malgré la destruction. Nos nouveaux guides nous aident à monter nos valises dans la camionnette qui nous mènera visiter les sites archéologiques de Saksayhuaman, Q’enko, Tambomachay, et la vallée sacrée. A Chinchero, un arrêt rapide nous permet de visiter une communauté tisserande qui nous livre ses secrets de teinture de la laine, par une petite animation menée de main de maître par une petite fillette fort décidée. Cette forme de tourisme a le bon côté de pousser les jeunes à en savoir plus long sur leur culture et à développer l’amour de transmettre leurs connaissances. En fin de journée, nous arrivons à Salinas, et nous visitons la communauté Inka qui depuis des millénaires exploite les salines. C’est la communauté qui attribue les parcelles à ses membres et qui revend sur le marché du commerce équitable. De passage à Ollantaytambo, nous poussons 1 h plus loin, jusqu’à la communauté de Patacancha où nous posons nos valises. Le groupe se sépare en 3 et s’installe dans les 3 familles pour souper et se reposer.

Le 12/11

Au petit matin, nous découvrons l’installation expérimentale de notre famille d’accueil. Un tube de métal passe dans le foyer économique qui chauffe un circuit d’eau. La famille prépare le petit déjeuner et en même temps, chauffe l’eau de la douche. Ce sont nos guides Miluska, Juanita, Herbert et Juan qui nous accueillent le matin pour le départ d’une expédition en altitude. Marie se sent fatiguée et reste au logement. Le but de l’expédition est la région des lagunes de Challwacocha. La camionnette serpente sur la route de pierrailles récemment ouverte. Il a plu et le chemin est glissant. Certains tronçons doivent être faits à pied, car la camionnette avance avec difficulté. Cela permet de prendre l’air pur des Andes et de profiter d’un panorama sans limites. L’altitude ne permet pas aux arbres de pousser. C’est une terre très fertile qui donne des patates, et de l’alpage à brouter pour les moutons et alpagas. L’icchu y pousse et sert de couverture aux maisons de terre. On trouve la llareta, une plante mémorable, de la famille des ombellifères qui ressemble pourtant à une grosse mousse et atteint parfois deux milles ans. Elle pousse quelques millimètres par an. Elle est utilisée par les communautés comme combustible, en absence de bois. Le moyen de transport sur ces chemins est le camion. Nous rencontrons une caravane spéciale qui s’est installée momentanément pour un échange de productions locales contre des denrées rares dans la contrée, comme les laitues, tomates, oignons, choux, coca, ustensiles de cuisine, des seaux, des bassins de plastique, etc…Nous atteignons à la première lagune, miroir glacé sous le soleil où se désaltèrent les espèces d’oiseaux, oies spécifiques. Après une longue marche, nous arrivons au lieu dit Chaupiurco, où nous attend une famille de pêcheur-agriculteur. Nous faisons connaissance avec le petit nouveau né alpaga et les enfants. Nous leur remettons une petite tablette de chocolat belge. Nous recevons le diner des énormes truites locales, chunos ou pommes de terres liofilisée, technologie incaïque et les tisanes bienfaisantes pour combattre le mal d’altitude. Le chef de famille, Agustin nous explique son quotidien. Nous l’accompagnons de l’autre côté de la vallée pour une cérémonie d’offrande à la terre-mère et remerciements aux apus des montagnes environnantes. Cette concentration sur les forces telluriques et ce monde spirituel qui nous dépasse fait du bien.

Il nous explique ce phénomène que j’avais lu déjà, de l’apparition de visions de Lama noir à l’endroit où se trouvent les trésors enfouis…hé oui, dans la lagune se trouve des trésors ! Il nous montre une autre richesse, ses cultures et comment il plante ses patates en soulevant simplement un coin de terre, noire à souhait. Les femmes de la famille sont aussi des artisanes de la laine. Elles exposent les ceintures, les petits sacs, les écharpes tissées, de teintures naturelles rouges, oranges, grises, mauves, c’est l’occasion de dépenser notre argent dans une contrée isolée où l’argent est chose rare, en échange d’un travail traditionnel et raffiné. Il se fait tard, quelques uns montent sur le dos des mules pour remonter la pente et prendre le chemin du retour avec la camionnette. Arrivés à Patacancha, nous découvrons Marie mal en point. Vite, il faut l’amener d’urgence à l’hôpital elle souffre du mal de l’altitude. L’ambulance la transfère elle et moi à l’Hôtel de Cusco où le contact est établi avec l’assurance. La mutuelle Chrétienne prend tout en charge. Les médicaments, les nuits d’hôpital, l’avion de rapatriement à Lima, les logements à Mano A mano etc. J’ai expliqué la situation à notre guide de Machu Picchu et aux Inkas vivants, et en mon absence, ils s’occupent du groupe.

Le 13/11

Pour assumer l’administration de la santé de Maria, J’ai dû me séparer du groupe et rester à Cusco. Pendant ce temps, les artisanes de Patacancha exposent leurs tissages traditionnels de laine teintes naturellement. Les voyageurs expérimentent le filage de la laine, observent la manière de tisser, entrent dans la petite église de Patacancha, assistent à un petit exposé sur les plantes médicinales, participent à une cérémonie d’offrande à la pachamama, et a une petite danse des enfants. En soirée, les voyageurs font leurs adieux à la communauté et descendent le chemin de Ollantaytambo. C’est à l’hôtel Las Portadas que installons nos valises. C’est là, très émue et sous pression devant tant de responsabilités que je rejoins épuisée les voyageurs qui me soutiennent de milles gentillesses. Nous prenons le temps de visiter les restes archéologiques d’Ollantaytambo. Nous visitons la ville Incaïque qui garde toute son ingéniosité du passé. Les rues pavées où l’eau courante court aux portes des maisons, les portails de pierres taillées en trapèzes, les cours intérieures où la vie des familles se déroule à l’abri des regards…Nous visitons le marché artisanal avec toutes ses beautés. Un bon repas nous attend au restaurant de touriste où une jeune fille d’Argentine nous émeut par ses chants et la musique de son charango. Fidèle au poste avec ses chambres propres, son eau chaude et l’accueil de la famille, ce petit hôtel nous offre le repos.

Le 14/11

A 5 h tout le monde debout pour prendre le train touristique de Machu Picchu. Deux heures serpentant le long du fleuve Apurimac, le chemin de fer arrive à la ville super touristique de Aguas Calientes . Je décide d’installer mon bureau dans un restaurant qui a la connexion internet et je laisse le groupe entre les mains de notre excellente guide péruvienne, Benilda qui parle Français. A leur retour le groupe est émerveillé et Benilda contente de l’intérêt de ses élèves. Pour avoir visité 9 fois le sanctuaire de Machu Picchu, je peux expliquer l’impression d’être suspendu entre ciel et terre, l’émerveillement que procure un assemblage architectural complètement intégré aux masses rocheuses et aux pentes vertigineuses. Ce n’est pas pour rien qu’il est la 4ème merveille du monde! Le grave problème, c’est l’affluence touristique. Il y a des alternatives, mais Macchu Picchu est irremplaçable ! Les deux premiers voyages organisés par IAI ne passaient pas par Cusco, mais, vraiment, cela laisse un goût de trop peu dans le rêve. Le calme de l’hôtel Las Portadas nous berce.

Le 15/11

Nous quittons la vallée sacrée et les jeunes Inkas vivants, une camionnette nous conduit au terminal de bus de Cusco pour y prendre le bus de Cusco-Juliaca. Une journée de route nous fait découvrir les larges horizons des hauts plateaux, le col de la Raya Notre guide, Luis Hoa et sa camionnette accueille le groupe pour le transfert dans la péninsule de Llachon, jusqu’au village de pêcheurs de Llachon. Je décide de quitter le groupe une nouvelle fois, pour continuer la gestion de la santé de María et pour essayer de trouver la solution à un deuxième problème : mes cartes de banque ne fonctionnent pas. Je fonctionne sur le prêt des voyageurs. Ce n’est pas très aisé.

Le 16/11

Journée de repos et de découverte de la vie de la communauté de Llachon. Les petits repas que nous préparent l’épouse de Louis sont délicieux. …. l’installation sanitaire est très rudimentaire, on se lave au bassin avec le thermo d’eau bien chaude. La douche est froide.

Le 17/11

Au lever du jour, Luis et le timonier nous font monter dans leur bateau de pêche. Le lac est de toute beauté et le ciel bleu resplendit. Le but de la navigation est l’accostage sur l’Ile de Amantani. La montée du chemin vers le centre de l’Ile nous plonge dans une ambiance méditerranéenne , avec l’eau azur, le ciel bleu et les pinèdes. La différence est l’altitude de 4100 m. Au sommet, sur la place se trouve le marché d’artisanat géré communautairement. Le principal artisanat est le travail de la laine de lama et d’alpaga, les écharpes, les bonnets, les jaquettes, très finement tricotés par les hommes et par les femmes. Nous quittons Amantani pour visiter les Iles mémorables des Uros. Ces Iles sont flottantes, par l’accumulation du fameux « jonc des chaisiers » en quantité, installées sur des blocs de tourbe, les iles se forment et s’entretiennent, en remettant une couche de joncs. Les cabanes de joncs sont construites sur l’ile et les pêcheurs vivent leur vie de famille sur l’ile, pêchant avec des embarcations de jonc. Étant donné que dans le groupe, 4 personnes connaissent 2 belges vivant au Monastère de Chuquito, nous décidons d’atteindre Chuquito en bateau. C’est donc notre troisième étape. Nous arrivons au Monastère et le père Simon Pierre Arnold ainsi que Anne Marie Mambourg nous montrent les lieux et nous accueillent avec une bonne tasse de café, bien de chez nous. Nous quittons ce havre de paix et reprenons un bus jusqu’à Capachica et Llachon. A Llachon les femmes tisserandes et tricoteuses, viennent s’installer dans la cour pour nous montrer leur savoir faire. C’est un bon moment pour échanger, le soir, une petite fête est organisée en l’honneur de la petite fille de la famille qui fête le corta pelo, la coupe de ses cheveux de bébé. Le bébé a du mal à rester éveillée mais on lui coupe les cheveux au son des instruments, Sikuris, bombos, et quena. Un repos bien mérité clôture une journée bien chargée.

Le 18/11

Après le déjeuner, nous bouclons les valises et faisons nos adieux à ces familles du lac Titicaca si touchantes. Aujourd’hui est une journée de transfert d’un monde à l’autre. Du haut plateau Andin à l’Amazonie ! Nous prenons à 10 h un avion de Star Perú volant jusqu’à Lima. Sylvie, Jorge et Socorro de Mano A Mano nous amènent le pic-nic, car nous n’avons pas le temps d’aller chez eux, notre avion pour Pucallpa part à 17 h. Maria nous rend visite à l’aéroport. Elle est en forme et reste dans l’ONG Mano A Mano. Nous leur laissons une partie des bagages pour ne pas nous encombrer de laine en forêt ! Nous atterrissons à l’aéroport de Pucallpa où Maurer, chargé de tourisme de la famille Maynas nous accueille. Le climat change du tout au tout. Du temps frisquet, nous passons aux grandes chaleurs. Nous transpirons, mais l’altitude a disparu. Le moyen de transport local est le mototaxi, petite moto tirant une cabine protégée d’un toit avec 3 places et un porte bagage. Les voyageurs sont étonnés et enchantés de la petite brise qui rafraichit. Nous arrivons à Puerto Callao et installons les valises dans le prolongement de l’habitation familiale de Daniel Maynas. Le souper tarde à arriver, on peut noter le manque d’expérience et la timidité de nos nouveauxguides. Tout le monde s’endort fatigué et pesants. Heureusement il n’y a pas beaucoup d’insectes.

Le 19/11

Problème ! Les voyageurs veulent changer de logement car il n’y a pas d’intimité, pas d’eau dans les sanitaires et les canards de la cour entrent dans l’espace de vie. Un hôtel est choisi non loin de Yarinacocha où vit la famille Maynas. Le transfert des valises terminé, Maurer, notre nouveau guide, nous fait visiter la ville. Nous achetons des bottes et des sandales pour chacun. Nous achetons les victuailles qui serviront le lendemain dans l’aventure Amazonienne en bateau. Nous passons un peu de temps au marché artisanal des femmes Shipibos et nous achetons les objets qu’elles ont fabriqués avec des matières naturelles et surtout les dessins stylisés adoptés depuis des millénaires par le Peuple Shipibos dans la céramique et les vêtements. Nous faisons la visite nocturne de la ville et reprenons le chemin de l’hôtel.

Le 20/11

Le petit déjeuner est pris à l’hôtel, certains ont pris un bon bain dans la piscine auparavant. Nous prenons un sac réduit pour 2 jours dans la communauté Shipibo de Panaillo. Maurer notre guide ne partira pas avec nous, car sa fillette de un an doit être hospitalisée. Les motos-taxis démarrent en direction de Yarinacocha où nous aurions dû être logés, mais un attentat l’an passé à incendié les installations touristiques que j’avais visitées l’année précédente. Après un petit égarement des taxis, tout le monde se retrouve et s’installe dans la barque à moteur équipée d’une bâche de plastique pour protéger du soleil et de la pluie. De petits matelas sont embarqués et amenés dans la communauté. La traversée de la forêt sur le fleuve Ucayali plaît à tous, la brise protège de la chaleur, mais attention de ne pas laisser sa main au soleil de peur d’être brûlé ! Les berges de l’Ucayali s’effondrent interminablement jour après jour comme des châteaux de sable, avec les vagues qui les assaillent. Les arbres et palmiers tombent à l’eau et flottent en surface rendant la navigation difficile. La luxuriance végétale repose l’œil et l’esprit. Nous partageons les mangues et les bananes et les biscuits. Nous observons de grands Martins Pêcheurs d’un bleu électrique, beaucoup d’hirondelles, des tisserins jaunes et noirs criant dessus leurs nids tissés habilement, des Butors immobiles se fondant dans la mangrove. Même quelques mouettes rieuses survolent notre embarcation.
Pour trouver l’accès à la communauté de Panaillo, il faut être fin connaisseur ! Après 4h de navigation habile du capitaine de bateau, nous arrivons à l’embouchure d’un petit cours d’eau menant à Panaillo. Nous accostons, avec l’aide de notre capitaine. Nous arrivons sur le chemin principal du village, juste en face de la case où nous allons dormir. Un escalier de bois nous aide à monter dans la maison de bois sur pilotis. Tout est construit en bois et très rudimentaire. Edith La fille de notre capitaine nous prête sa chambre. Elle installe les matelas de mousse sur le plancher et des moustiquaires sont attachées à la toiture. Les coussins n’ont pas été oubliés, mais je dormirai sur le plancher. En forme de diversion, Michel ouvre la housse de sa guitare et s’installe sur un banc de fortune. Les enfants du village se regroupent et se détendent peu à peu, sur le mode de la farce et de la joie proposées par Michel dans son tour de chant. Edith nous propose une boisson désaltérante, une tisane et un plat de riz et poulet agrémenté des quelques tomates amenées. Après le repas, nous partons en balade sur la grand rue de Panaillo. Cette grand rue a diminué de moitié. La partie en aval s’est effondrée avec les crues de l’Ucayali, les maisons ont disparu, la communauté a perdu la moitié de ses terres. Nous passons devant les trois écoles, maternelle avec une dizaine de petits, primaire avec une cinquantaine d’enfants, et secondaire avec une vingtaine de grands, mais elles sont vides, car c’est dimanche. Des mamans de la communauté enseignent dans l’école maternelle. Les enseignants de l’école primaire et secondaire sont extérieurs à la communauté. Nous passons devant la maison communale où notre capitaine est également administrateur. On peut remarquer le peu d’animaux dans la communauté, quelques poules et poulets et de petits cochons noirs en liberté. Pratiquement aucuns potagers, aucunes cultures. Notre promenade nous conduit près d’une lagune qui se trouve derrière la communauté, la lagune de Calmito. On nous montre une tortue et de gros escargots. En soirée, une petite réception est organisée par notre capitaine qui, aussi, est guide de l’église évangéliste. Il a préparé un groupe de 4 jeunes à présenter un petit spectacle de danses. Les jeunes sont tout heureux de nous offrir ce petit témoignage culturel. Toute la communauté est assise dans le sable, à la lueur d’un phare alimenté par un moteur. Après le spectacle, tour à tour, des personnes, femmes et hommes de la communauté prennent la parole. Ils souhaitent la bienvenue aux voyageurs. Ils critiquent la famille Maynas qui organise le tourisme à son profit. Ils se trouvent marginalisés et non bénéficiaires. Ils se plaignent d’être complètement oubliés et abandonnés. Ils nous expliquent les grandes crues de la rivière qui commencent en décembre pour se terminer en mai. Les crues sont les conséquences des pluies intenses se formant dans les zones Andines et dévalant les pentes. Les crues sont aussi les conséquences de la fonte des glaciers. Ces crues sont les conséquences des changements climatiques. Elles rasent toute la végétation sur leur passage. Elles inondent les chemins, les maisons pilotis, emportent les chiens, les poules, les cochons et les enfants. Elles provoquent des maladies jusqu’au choléra. Les familles vont chercher les tables des écoles pour vivre dessus. La vie est devenue insupportable. Les familles sont désespérées et personne ne s’occupe d’eux. La semaine suivante, la directrice de la communauté va être reçue par une instance qui s’occupe de l’attribution de territoire. Le territoire traditionnel de la communauté disparaît et doit être remplacé par d’autres terres plus en retrait du fleuve. C’est la seule alternative. Les conséquences des changements climatiques sont vraiment terribles en Amazonie depuis 12 ans. La communauté attend un geste, une aide, qui viendra peut être ou pas… Michel reprend sa guitare pour partager quelques chants bien à lui, repris en chœur par notre petite troupe attristée par la situation. Les enfants sont tout contents et cet intermède détend un peu la tension énorme et les gorges serrées. Nous allons nous coucher tendus, en silence, sans ronchonner sur le manque de confort. Impressionnés par les réclamations et les cris d’alarme.

Le 21/11

Le matin, les enfants vont à l’école, c’est lundi, et la procession des enseignants suit les jeunes. Nous déjeunons avec une boisson traditionnelle le "chapo" à base de banane plantain et le Tacacho, banane plantain cuite mélangée à du poisson. Nous sommes appelés à une réunion dans la maison du groupe des femmes. Nous allons à la réunion pour y découvrir les merveilles de broderies qu’elles réalisent. Chacun achète un maximum de broderies qui bénéficient à ces familles désespérées et dépouillées de tout. Il y a bien le centre artisanal dans la ville de Pucallpa, que nous avons visité, mais leurs réalisations n’arrivent pas là bas, si loin. Elles nous demandent de nous fournir la toile de base de leur travail de broderie. Auparavant, elles filaient et elles tissaient, mais ce travail s’est perdu. Je demande la signification des broderies qui ont le même symbolisme que dans la poterie de toute beauté. Je suis émerveillée de recevoir enfin les explications recherchées depuis 20 ans. Les graphismes représentent les rivières, les lagunes, les fleurs, les iles, les boas, la plante d’Ayahuasca. Elles m’ont fait un beau cadeau, la compréhension des dessins. Notre capitaine nous emmène en bateau sur l’autre rive, face au village. C’est un endroit où se trouvent beaucoup d’arbres médicinaux. Il nous en donne l’explication et pousse la balade jusqu’à la laguna Pxe Bita où il émet quelques cris pour faire sortir de l’eau les caïmans et crocodiles qui pourtant restent immobiles, un rapace d’une grande beauté apparaît et il dialogue avec l’oiseau. Après quelques adieux, nous embarquons dans le bateau avec Edith, son bébé et son papa. Durant tout le voyage de 6h, Edith brode sans relâche, son bébé dans son giron. A la tombée du jour, nous arrivons à Pucallpa . Nous allons manger un plat régional avec la famille Maynas dont la fillette est guérie. Repos à l’hôtel qui nous parait encore plus luxueux après notre aventure Amazonienne.

Le 22/11

Quelques uns profitent de la piscine avant le déjeuner. Et ensuite nous partons visiter le parc zoologique de Pucallpa où malheureusement sont enfermés tous ces animaux magnifiques que la forêt ne nous a pas dévoilés. Nous visitons une dernière fois Pucallpa et nous sommes accueillis dans la maison des parents Maynas qui nous reçoivent avec un bon repas. Nous retournons à l’hôtel pour une dernière nuit.

Le 23/11

Quelques uns profitent une dernière fois de la piscine. Nous nous retrouvons au déjeuner et dans l’entrée avec nos bagages. Une petite réunion de mise au point à propos de la gestion du tourisme communautaire a lieu. Nous remercions nos hôtes tout en remettant en cause leur compréhension du tourisme communautaire. Nous partons en moto taxi à l’aéroport pour atteindre notre vol Pucallpa à Lima de 11 h. Heureux de nos retrouver en famille dans les locaux de Mano A Mano, nous nous réinstallons pour une ultime nuit. Après le diner, la camionnette nous emmène dans le quartier chic de Miraflores… Quel contraste, c’est à ne pas y croire ! Nous visitons le marché artisanal qui couvre plusieurs rues. Mais le temps est limité à 1/2 h il faut courir ! Ensuite nous nous dirigeons vers le quartier festif de Barranco où nous avons donné rendez vous à un coopérant de l’ONG Terre. Nous trouvons un restaurant un peu sombre et dans la nuit, nous parcourons Barranco illuminé, par de petits bars attrayants, jusqu’au point de vue sur l’océan. Retour à Comas pour dormir.

Le 24/11

Après le déjeuner préparé par Mano A Mano, le bus nous emmène dans le quartier pauvre de La Ensenada, où l’ONG de Sylvie Dumans fait des merveilles depuis 20 ans grâce aux dons des communes Françaises du Perche. Socorro nous fait rencontrer un groupe de femmes qui construisent les murs d’enceinte du terrain de football. Nous visitons la ludothèque, la bibliothèque, le petit jardinet avec le biodigesteur, et l’atelier d’artisanat. Nous rentrons à Comas pour goûter et préparer les bagages pour la Belgique. Nous allons à l’aéroport, l’avion décolle à 21 h 20. Ce fut 21 jours intenses et bien remplis !

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